Double meurtre de Pau : Romain Dupuy devant le juge, depuis l’hôpital psychiatrique

sept. 05, 2023

Double meurtre de Pau : Romain Dupuy devant le juge, depuis l’hôpital psychiatrique

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Par Jean-Pierre Tamisier
Publié le 08/05/2013 à 0h00
Mis à jour le 08/05/2013 à 15h10
VIDEO. Chaque mardi, un juge se rend au centre hospitalier pour l’audition des personnes hospitalisées sous contrainte. Parmi elles, Romain Dupuy. Le jeune homme qui s’avance dans la salle d’audience s’appelle Romain Dupuy. Reconnu coupable des meurtres de Chantal Klimaszewski et Lucette Gariod , une infirmière et une aide-soignante de l’hôpital de Pau, tuées au cours de la nuit du 17 au 18 décembre 2004, il avait été déclaré pénalement irresponsable en décembre 2007 et admis au sein de l’unité pour malades difficiles de Cadillac , où il se trouve toujours. Hier matin, comme une quinzaine d’autres patients de l’hôpital de Cadillac hospitalisés sans leur consentement, il était convoqué devant Fabienne Zuccarello, juge des libertés et de la détention au tribunal de grande instance de Bordeaux.
La loi du 5 juillet 2011 fait obligation aux juges de contrôler que la mesure d’hospitalisation sans consentement, décidée par le préfet ou le directeur de l’hôpital à la demande d’un tiers, correspond à une nécessité.
« Un contrôle s’exerce vingt-quatre heures après le début de l’hospitalisation, puis soixante-douze heures après, puis entre le cinquième et le huitième jour par les psychiatres. Le juge intervient au bout de quinze jours et ensuite, de façon automatique tous les six mois. Mais il peut se faire à tout moment, à la demande du patient », explique Fabienne Zuccarello.
Les avocats ont aussi leur place, si les personnes concernées le souhaitent. Ils disposent même d’un bureau dans l’enceinte de l’hôpital, près de la salle dévolue aux audiences (lire ci-contre) pour s’entretenir avec eux. Hier matin, Me Ludovic Baustier, avocat de permanence, avait été demandé par neuf des quinze personnes convoquées.
« Pour un avocat, c’est un exercice très particulier. Nous sommes peu nombreux à Bordeaux à accepter de le faire.
Nous exprimons les demandes de personnes qui ont parfois beaucoup de difficultés à s’exprimer ou à comprendre ce qui se passe . »
L’exercice est tout aussi délicat pour le juge appelé à prendre une décision qui peut être la main levée de la décision d’hospitalisation sous contrainte. « L’hospitalisation sans consentement a un objectif de santé publique et de protection de l’ordre public. Mais elle est privative de liberté. Le rôle qui est le nôtre depuis 2011 n’est pas en opposition avec celui des psychiatres. Nous n’avons simplement pas le même angle d’approche. Nous nous assurons que la mesure est dans l’intérêt du patient. »
Hier matin, Fabienne Zuccarello a donc été confrontée à Romain Dupuy. Coiffé de dreadlocks et vêtu d’une veste de surplus militaire verte. «
Je suis là pour vérifier que votre hospitalisation est toujours justifiée . Êtes-vous d’accord ? », lui a demandé la magistrate. « Aujourd’hui je prends cette hospitalisation sous contrainte comme une sanction pénale. Je suis stabilisé depuis des années . Je fais des sorties avec escorte. Je devrais être en hospitalisation classique », a-t-il répondu. Il y a quelque temps, il a été changé de pavillon et pris en charge par une nouvelle équipe soignante. « Une sorte de sanction. Parce que j’avais reçu un courrier avec un joint de cannabis à l’intérieur. Mais ça m’a permis, au bout de huit ans, de changer de psychiatre. »
«
Je rendrai ma décision vendredi. Mais elle sera sans surprise », l’a averti Fabienne Zuccarello.
Au fil de la matinée, elle a aussi entendu Patrice, 38 ans, hospitalisé depuis plusieurs mois après des accès de violence, Grégory, Breton de 30 ans, condamné pour viol puis transféré dans un hôpital psychiatrique où il a commis de nouvelles agressions sexuelles. « Je suis conscient d’avoir encore besoin de soins », a-t-il confié à la juge.
Nadia, 44 ans, déclare à Fabienne Zuccarello qu’elle apprécie d’être hospitalisée. La jeune femme a été condamnée à une peine de prison ferme pour des faits de violence mais a tenté de mettre fin à ses jours. Elle conserve depuis ce geste des séquelles neurologiques.
Thierry veut, quant à lui, retrouver sa liberté. L’alcool l’a amené là. Mais il pense pouvoir sortir et l’a fait savoir au juge. « Vous avez face à vous un homme qui se sent oublié. Il a l’impression de faire partie des meubles. Il a fait plusieurs séjours depuis 2006 », soulignait Me Baustier.
Pour lui, Fabienne Zuccarello a pris une décision dans la journée. Elle n’a pas été dans le sens attendu par Thierry. Les rapports des deux psychiatres appelés à remettre des conclusions (ils le font pour chaque cas) et le sentiment de la magistrate à l’issue de l’audition n’y conduisaient pas.


Des audiences « foraines »


La loi du 5 juillet 2011 a confié aux juges le soin de vérifier le bien fondé des hospitalisations sans consentement. Pour exercer ce contrôle, les magistrats peuvent faire venir les patients concernés, comme n’importe quel justiciable, au palais de justice ou encore établir un lien par visioconférence. Cette dernière méthode est toutefois condamnée par le contrôleur général des lieux de privation de liberté et la commission consultative des droits de l’homme, qui recommandaient en revanche des audiences dites « foraines ». Parce qu’elles conduisent les magistrats à se déplacer dans les hôpitaux. C’est la formule choisie par le tribunal de grande instance de Bordeaux en accord avec les hôpitaux Charles-Perrens à Bordeaux et de Cadillac. Dans les deux cas, les centres hospitaliers ont aménagé des salles d’audience en leur sein.À Cadillac, elle a vraiment pris la forme d’une salle de tribunal et, dans l’enceinte, des panneaux annoncent « annexe du TGI ». Des audiences se déroulent le lundi et le jeudi à Charles-Perrens (où les cas sont souvent moins complexes) et le mardi à Cadillac. En 2012, les juges des libertés et de la détention de Bordeaux, qui sont dans ce contexte des juges de la liberté, ont examiné 1 708 dossiers et prononcées 44 mains levées. Du 1er janvier au 30 avril 2013, 547 dossiers ont été examinés et 17 personnes ont vu leur hospitalisation sous contrainte prendre fin.

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